Le 12 février 2024 – Ottawa (Ontario) : Le gouvernement du Canada a annoncé le lancement du Régime canadien de soins dentaires (RCSD), dont le budget d’élève à 13 milliards de dollars.

L’Association dentaire canadienne (ADC) plaide depuis longtemps en faveur d’investissements ciblés pour améliorer les soins de santé buccodentaire au Canada, surtout en ce qui concerne les personnes rencontrant des obstacles pour accéder aux soins. L’engagement financier du gouvernement fédéral dans le cadre du RCSD peut améliorer considérablement l’accès à la santé buccodentaire pour les Canadiens, en particulier pour les populations vulnérables.

Le 31 janvier, le ministre de la Santé, Mark Holland, a réitéré son engagement à ce que le RCSD soit équitable pour les dentistes, en déclarant : « Je suis convaincu que nous aurons quelque chose de juste tant pour les patients que pour les dentistes ». Le gouvernement fédéral a encore du travail pour que cette promesse se concrétise.

Au cours des deux dernières années, l’ADC a représenté les patients et la profession dentaire dans les discussions avec Santé Canada. L’ADC et les associations dentaires provinciales et territoriales (ADPT) ont fourni des renseignements sur ce qui est nécessaire pour assurer des soins de santé buccodentaire optimaux à tous les Canadiens. Nous avons partagé des recommandations essentielles qui amélioreront le RCSD et renforceront la participation des fournisseurs de soins. L’ADC a clairement indiqué que le RCSD ne sera couronné de succès que si les dentistes fournissent des soins aux patients admissibles. Les dentistes que je connais veulent traiter les patients qui ont besoin d’accéder aux soins, mais le RCSD ne doit pas avoir d’impact sur le système de santé buccodentaire en érodant les excellents soins que reçoivent les deux tiers des Canadiens.

Les dentistes de tout le pays souhaitent que le RCSD soit une réussite. Bien que le gouvernement fédéral ait consulté l’ADC depuis l’annonce, le programme n’a pas intégré plusieurs des principales recommandations stratégiques faites par l’ADC, notamment : veiller à ce que les procédures administratives n’aient pas d’incidence sur la prestation des soins aux patients ou ne la retardent pas; et veiller à ce que le coût des traitements fournis aux patients soit entièrement couvert. L’ensemble des recommandations de l’ADC est présenté dans notre document d’orientation de 2023 Combler les lacunes en matière de financement des soins dentaires.

La couverture des six premiers mois du programme sera limitée. De nombreux traitements de routine ne seront pas disponibles pour les personnes âgées qui en ont le plus besoin. Santé Canada doit indiquer clairement aux patients et aux fournisseurs de soins quels services seront couverts afin d’éviter toute confusion.

Les Canadiens doivent savoir que le RCSD n’offre pas de soins dentaires gratuits. À l’heure actuelle, les coûts des soins buccodentaires pour les patients dans le cadre du RCSD ne sont pas clairs; toutefois, le gouvernement a établi un barème d’honoraires inférieur aux guides d’honoraires provinciaux et territoriaux habituels et courants. Les Canadiens ne seront pas couverts à 100 % pour leurs traitements et, dans de nombreux cas, ils devront payer de leur poche une partie de leur traitement.

Les Canadiens devraient pouvoir choisir le prestataire de soins buccodentaires qu’ils souhaitent. Contrairement aux régimes de prestations traditionnels, les fournisseurs de soins doivent adhérer au RCSD pour traiter les patients. Cette condition est propre au RCSD et, au Canada, la quasi-totalité des régimes publics ou privés ne l’exige pas. Les patients du RCSD méritent un programme simple qui ne crée pas d’obstacles inutiles à l’accès aux soins. Lors d’une enquête, près de la moitié des dentistes (hors Québec) ont déclaré qu’ils avaient besoin de plus de détails pour prendre une décision éclairée quant à leur participation au programme. On peut penser que très peu de dentistes voudront s’engager dans un programme qui n’offre pas de conditions claires. Que sont censés faire les patients du RCSD si le fournisseur de soins qu’ils préfèrent ne participe pas au programme? Les patients du RCSD ont droit aux mêmes options que les Canadiens qui ont une assurance privée et qui ont accès à n’importe quel dentiste qui accepte de nouveaux patients. En tant que présidente de l’ADC et dentiste en exercice, je sais qu’il est essentiel que le RCSD respecte les relations existantes entre dentistes et patients mais aussi qu’il favorise le développement de nouvelles relations entre patients, dentistes et les Canadiens mal pris en charge. Il est essentiel que la participation au RCSD soit simple pour les prestataires et pour les patients.

Je recommande aux patients de s’informer sur le RCSD et de demander à leur cabinet dentaire s’il envisage d’y participer. Les patients sont également encouragés à bien réfléchir à l’impact de l’abandon de leur assurance dentaire actuelle. L’abandon d’une couverture existante les rendra inadmissibles au RCSD.

Le RCSD représente une occasion unique d’améliorer de manière significative la santé buccodentaire de millions de Canadiens. Compte tenu de la complexité et du défi que représente la mise en œuvre d’un tel programme, nous reconnaissons l’engagement du ministre Holland à continuer d’améliorer le plan jusqu’à son lancement et après celui-ci. Cependant, le gouvernement fédéral doit faire les choses correctement en donnant aux dentistes les moyens de se concentrer sur ce qu’ils font le mieux : s’occuper de la santé buccodentaire de leurs patients.

Cette tribune a été rédigée par la Dre Heather Carr, présidente de l’ADC et publiée en février 2024.