Le Collège royal des dentistes du Canada : Historique, malentendus et événements

David B. Kennedy, BDS, LDSRCS(Eng), MSD, FRCD(C)

© J Can Dent Assoc 2001; 67(10):574-6
 Cet article a fait l’objet d’une révision par des pairs.


 Suite à des entretiens avec des collègues et des personnes qui ne sont pas dentistes, il m’apparaît indéniable que leurs connaissances sur le Collège royal des dentistes du Canada (CRDC) sont généralement limitées. Certains dentistes pensent que le CRDC détermine les spécialités qui seront reconnues en médecine dentaire, alors que c’est en fait l’Association dentaire canadienne (ADC) qui prend ces décisions. D’autres pensent à tort que le CRDC est un organisme chargé d’octroyer l’autorisation d’exercer, alors qu’en fait ce sont les organismes de réglementations dentaires (ORD) (par exemple le Collège des chirurgiens dentistes de la Colombie- Britannique) qui sont responsables de la délivrance des permis d’exercer. Le rôle réel du CRDC est de gérer l’examen national des spécialités dentaires (ENSD), une activité dont l’importance va s’accroître à la fois pour la profession et pour le public. Cet article a pour but de cla rifier certaines fausses idées et d’expli quer le rôle du CRDC dans l’organisation de la profession dentaire.

Historique

Au cours des années 60, l’ADC avait constaté l’importance de créer un organisme indépendant permettant d’établir des normes pour les dentistes spécialistes au Canada. Cette fonction d’instauration et de vérification de l’application des normes par les dentistes spécialistes ressemblerait à la réglementation concernant les dentistes généralistes régie par le Bureau national d’examen dentaire et les organismes de réglementation provinciaux. Le 18 mars 1965, la Loi constitutive concernant le Collège royal des dentistes du Canada a été promulguée par le Parlement. Les objectifs du CRDC, tels que stipulés dans la Loi constitutive sont les suivants :

Par le biais de cette loi, le CRDC est devenu le seul groupe détenant l’autorisation parlementaire de faire passer des examens aux dentistes spécialistes à l’échelle nationale.

L’organisation structurelle du CRDC est comparable à celle du Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada (CRMCC), et ses règlements ont été rédigés avec l’appréciable collaboration du registraire du CRMCC. Alors que le CRDC était en train de prendre forme, il s’était avéré nécessaire de nommer un conseil appelé «conseil provisoire» chargé d’assumer les fonctions qui devaient ensuite être prises en charge par le CRDC. Les membres de ce conseil, nommés par l’ADC, comprenaient 2 éminents spécialistes hautement qualifiés dans chacune des spécialités reconnues par l’ADC.

À l’origine, des examens provisionnels avaient été proposés aux praticiens déjà inscrits en tant que spécialistes, permettant ainsi de constituer une base de membres pour le CRDC. Il ne faut pas oublier que vers le milieu des années 60 les dentistes spécialistes n’avaient pas tous suivi de formation officielle, bien que nombre d’entre eux l’avaient fait. Par exemple, certains d’entre eux exerçaient à titre de spécialistes depuis de nombreuses années, bien qu’aucune formation officielle n’ait existé dans les années 40 et 50, lorsqu’ils avaient ouvert leur cabinet. La réussite de l’examen provisionnel permettait au candidat d’utiliser le titre de fellow du Collège royal des dentistes du Canada (FRCD(C)).

Ultérieurement, l’examen fut présenté sous la forme d’une épreuve en 2 parties : La première partie avait pour thème les sciences fondamentales associées à la spécialité individuelle, et la deuxième partie avait une orientation plus clinique; il était fréquemment demandé au candidat d’étayer la partie 2 par l’historique de cas traités avec leur suivi à long terme. La partie 1 de l’examen pouvait être passée immédiatement à la suite de l’obtention du diplôme décerné par un programme de spécia lité ou un programme de formation; en revanche, il était nécessaire d’attendre 3 ans après l’obtention d’un diplôme décerné par un programme de spécialité avant de pouvoir passer la partie 2. Dans les années 70 et 80, le titre de FRCD(C) cor respondait à bien des égards à l’agrégation remise par les orga nismes de certification de spécialités dentaires américains. En conséquence, ce titre était souvent reconnu comme équivalent, mais la réciprocité n’était pas accordée. La différence structurelle la plus importante réside dans le fait que le CRDC, un organisme national unique, examine toutes les spécialités dentaires reconnues par l’ADC alors qu’aux États-Unis il existe une commission d’examen pour chaque spécialité.

En 1981, la partie 1 de l’examen fut modifiée en vue d’inclure une composante clinique et a elle été classée comme examen de premier échelon, une évaluation des compétences menant au titre de «membre» (MRCD(C)). L’ancienne partie 2 de l’examen fut classée comme examen spécialisé, donnant le niveau de «fellow» (FRCD(C)). Rétrospectivement, la catégorie MRCD(C) a eu son utilité, puisqu’elle a été choisie par certains ORD comme critère d’autorisation d’exercer la spécialité. Malheureusement, beaucoup de candidats ayant passé l’examen d’adhésion n’ont pas continué jusqu’au niveau de fellow ce qui a mené à la perception qu’il existait 2 niveaux de dentistes spécialistes. L’examen d’adhésion fut finalement renommé «partie 1» de l’examen afin d’éliminer cette confusion.

Il est devenu primordial pour les spécialistes exerçant en milieu hospitalier d’obtenir ce statut de fellow, ce dernier étant souvent capital en vue de l’obtention des privilèges hospitaliers dans le cadre des spécialités dentaires comme par exemple la chirurgie buccale et maxillo-faciale, la pathologie bucco dentaire, la dentisterie pédiatrique, la radiologie buccale et maintenant la médecine buccale. Les qualifications dentaires du titre de fellow correspondent à l’équivalent dans le domaine médical et fournissent une norme nationale pour les spécia listes, quel que soit l’organisme auprès duquel ils ont été formés.

Derniers événements

Au cours des dernières années, on a pu remarquer une rapide succession de changements d’orientation dans le cadre des activités du CRDC, principalement précipitée par la proposition de l’Accord sur le commerce intérieur. L’un des principes fondamentaux de cet accord est la facilité de la transférabilité des qualifications. Par conséquent, en vertu de cet accord, les ORD qui décernent les permis d’exercer, ne seront pas autorisés à empêcher les dentistes reconnus comme spécialistes dans une province ou un territoire d’exercer dans une autre province ou territoire. Il a été exigé théoriquement des ORD de signer un Accord de reconnaissance mutuelle (ARM) avant le mois de juillet 2001 afin d’assurer la conformité avec l’Accord sur le commerce intérieur. Au moment de l’impression de cet article, 7 des 10 ORD ont signé l’ARM.

La majorité des ORD exigent actuellement que les nouveaux spécialistes aient suivi une formation de deuxième cycle ou un programme de résidence certifié soit par l’ADC, soit par l’Association dentaire américaine (ADA). La plupart des associations requièrent également que les dentistes spécia listes aient passé un examen, sous une forme ou une autre. Le but est d’évaluer les compétences individuelles plutôt que le contenu des différents programmes. Au cours des dernières années et jusqu’en 2000, l’examen d’adhésion au CRDC ou partie 1 a été sélectionné par de nombreux ORD comme étant l’une des exigences pour pouvoir exercer en tant que nouveau spécialiste. De plus, pour de nombreux spécialistes exerçant en milieu hospitalier le titre de fellow était exigé pour l’obtention des privilèges hospitaliers. La situation présentait un risque de discorde étant donné que des spécialistes compétents et qualifiés pouvaient se voir refuser le bénéfice des privilèges hospitaliers, faute de ne pas avoir le titre de fellow. Pour cette raison, vers le milieu des années 90, les examens dans les domaines de la chirurgie buccale et maxillo-faciale et d’autres spécialités en milieu hospitalier telles la ra diologie buccale, la pathologie buccodentaire et la médecine buccale ont été transformés en examen de fellow en une étape, disponible au terme du programme de formation ou du programme de résidence. En 1997, les examens en dentisterie pédiatrique ont également été changés en examen en une étape, donnant droit au titre de fellow. Ces changements ont créé des disparités entre les spécialités pouvant obtenir le titre de fellow en une étape et les autres spécialités, en particulier l’orthodontie, la prostho dontie, l’endodontie, la santé dentaire publique et la parodontologie, qui continuaient à requérir l’obtention d’un titre de fellow en 2 étapes (la partie 1 obtenue à la réception du diplôme et le titre de fellow obtenu quelques années plus tard).

Le groupe de travail sur les relations des spécialités entre les provinces (Provincial Specialty Relations), constitué de représentants des différentes ORD et du CRDC, fut fondé à la fin des années 90 et avait pour mission d’examiner ces sujets de discorde. Grâce à cet important effort de collaboration, le CRDC a exigé que toutes les spécialités ne soient dotées que d’un examen unique de premier échelon en une étape, permettant l’obtention du titre de fellow à partir de l’année 2001. En outre, en vue de satisfaire aux exigences particulières de chaque ORD provincial, il a été demandé au CRDC de gérer le ENSD à partir du mois de janvier 2001. Les candidats qui réussissent le ENSD peuvent obtenir une autorisation d’exercer en tant que spécialiste dans la province de leur choix. Ils ont également la possibilité de demander le titre de fellow, en fonction des exigences d’accréditation du CRDC. Il est par conséquent probable qu’à partir de 2001, la majorité des nouveaux dentistes spécialistes qui réussissent le ENSD régi par le CRDC, recevront, sur demande au CRDC, le titre de FRCD(C). Ce processus est identique à celui permettant à leurs homologues médecins d’obtenir le titre de fellow.

Les dentistes spécialistes accrédités au niveau provincial, ayant réussi la partie 1 des examens du CRDC et détenant le titre de MRCD(C) ou ne possédant pas d’expérience antérieure des examens du CRDC pourraient se sentir inquiets de ne pas posséder le titre de FRCD(C), alors que la majorité des spécia listes dentaires pourront se voir décerner le titre en passant un seul examen. Afin de répondre à ces préoccupations, le CRDC offrira pendant une durée limitée aux spécialistes accrédités au niveau de leur province la possibilité d’obtenir le titre FRCD(C) en réussissant un examen provisionnel. Les examens au contenu provisoire auront une orientation clinique et leur structure exacte sera spécifique pour chaque spécialité dentaire. Ils seront disponibles à partir de 2002.

Le processus d’examen

Les ORD, afin de s’acquitter de leur rôle de protection du public, doivent s’assurer que les spécialistes satisfont le niveau de compétences requis pour exercer. Le CRDC agit de concert avec les ORD en vue de développer des méthodes d’évaluation perfectionnées acceptables pour les 2 parties. Considérant que la réussite au ENSD régi par le CRDC deviendra bientôt le principal critère d’obtention de l’accréditation dans une spécialité dans la plupart des provinces et territoires, le processus d’examen devient maintenant un contrôle des compétences de premier échelon dont l’enjeu est élevé. À intervalles réguliers le CRDC a procédé à des ateliers pour les examinateurs, et un psychométricien a récemment été embauché pour aider les examinateurs à développer des techniques d’examen adaptées au premier échelon d’une spécialité qui répondent aux exigences des ORD. Un atelier réunissant des examinateurs s’est déroulé en 2000, avec le concours des organismes de réglementation de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, de l’Ontario et du Québec, qui ont tous apporté leur soutien financier. En 2001, les examinateurs dans les domaines de la chirurgie buccale et maxillo-faciale ont organisé un atelier visant à préciser le processus d’examen.

La réussite du ENSD pourrait augmenter la transférabilité des accréditations d’un spécialiste. Toutefois, cette transférabilité est soumise à la signature de l’Accord de reconnaissance mutuelle par les ORD. Par conséquent, la réussite au ENSD sera considérée comme équivalent aux examens du Bureau national d’examen dentaire pour les dentistes généralistes.

Le CRDC offre également un mécanisme d’évaluation pour les diplômés étrangers en médecine dentaire. Vu les difficultés de recrutement en Amérique du Nord, les doyens des écoles de médecine dentaire canadiennes se sont souvent orientés vers des diplômés étrangers pour remplir les principaux postes de professeurs. Afin de prêter son concours dans le cadre de l’évaluation des qualifications de ces professeurs qui sont susceptibles d’être recrutés pour occuper un poste de directeur d’un département, le CRDC propose un processus comprenant l’examen des accréditations et l’autorisation de passer l’examen pour l’obtention du titre de fellow. L’approbation est soumise à la capacité du demandeur à prouver qu’il ou elle a suivi une formation dans un programme équivalent aux programmes accrédités par la Commission de l’agrément dentaire du Canada (CADC) ou par la Commission de l’agrément dentaire de l’Association dentaire américaine (CADA). Comme beaucoup de ces professeurs universitaires possèdent une expérience en recherche, une méthode différente d’obtention du titre de fellow a été élaborée. L’examen est tout aussi strict que l’examen conventionnel, mais il prend en considération leur expérience en matière de recherche et d’enseignement. Le processus d’examen du CRDC assure que les candidats répondent aux normes correspondant aux pratiques de l’enseignement et de la dentisterie en Amérique du Nord.

Le processus et les questions de l’examen du CRDC sont élaborés afin de refléter le contenu requis par le CADC et la CADA; de plus, le CRDC est représenté au sein de l’orga nisme canadien pour faciliter l’échange d’information. La base de connaissances se modifie, c’est pourquoi il est nécessaire de s’assurer que la formation suivie par les candidats est adéquate. Pour ce faire, il faut procéder non seulement à la révision des examens, mais aussi au maintien de la communication avec les responsables des programmes de deuxième cycle accrédités par le CADC ou la CADA. La collaboration s’accentue maintenant entre le CRDC, les dirigeants des programmes de deu xième cycle et les groupes nationaux de spécialités. Il est à espérer que les responsables des programmes de deuxième cycle au Canada seront dans l’obligation de posséder le titre de fellow ou une accréditation de la Commission américaine, une exigence qui a déjà été instaurée aux États-Unis. En vue d’approfondir le processus d’examen, le CRDC consulte les différentes commissions de spécialités dentaires des États-Unis, le CRMCC et d’autres groupes compétents.

Les strictes directives reçues par les examinateurs en matière de conduite et de confidentialité évitent les conflits d’intérêt. Les ORD s’intéressent à la qualité du processus d’examen et ils peuvent mandater des observateurs chargés de surveiller les examens. Toutefois, les observateurs qui n’ont pas encore obtenu le statut de fellow ne sont pas autorisés à se présenter à l’examen du CRDC pendant une période de 5 ans à compter de la date de leur intervention. Les observateurs sont supposés suivre le même strict code de conduite et de confidentialité que les examinateurs du CRDC. Les ORD sont également représentés au Conseil du CRDC, en particulier pour les questions qui touchent directement aux examens.

Le CRDC offre des examens dans toutes les spécialités dentaires, y compris les sciences dentaires. De plus amples ren seignements sont disponibles auprès du CRDC à l’adresse suivante : Collège royal des dentistes du Canada, 5075, rue Yonge, bureau 405, Toronto, ON M2N 6C5. Tél. : (416) 512-6571, téléc. : (416) 512-6468, director@rcdc.ca  , www.rcdc.ca  

Résumé

Les normes de pratique imposées aux dentistes spécialistes sont d’une importance considérable aux yeux du public et des autres dentistes. Les ORD exigeront prochainement l’établis sement de normes nationales pour les dentistes spécialistes commençant à exercer, quel que soit le lieu de leur formation ou cabinet. Le CDRC joue un rôle primordial en assurant le respect de ces normes en offrant le ENSD, qui peut également aboutir à l’obtention du titre de fellow au Collège royal des dentistes du Canada. 


Remerciements : L’auteur souhaite remercier pour leur précieuse collaboration ses collègues du Collège royal des dentistes du Canada, les Drs Allen Wainberg, James Shosenberg, John Fraser, Keith Titley et John McComb, ainsi que le directeur général, M. David McDonald, et le registraire émérite, le Dr John Speck.

Le Dr Kennedy est le vice-président du Collège royal des dentistes du Canada.

Écrire au : Dr David B. Kennedy, 650 O. 41e Ave., bureau 200, Vancouver, C.-B. V5Z 2M9. Courriel : kennedys@direct.ca. 

Les vues exprimées sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement les opinions et les politiques officielles de l’Association dentaire canadienne.