Premier prix : Samer Karkout Deuxième prix : Ahmed Abbas Prédire l’issue d’un cancer de la bouche Samer Karkout de l’Université McGill a reçu le premier prix pour sa recherche sur la prédiction de la survie des patients atteints d’un cancer de la bouche, une étude qui compare l’indice de comorbidité de Charlson (CCI) et la classification de la Société américaine d’anesthésiologie (ASA). «Les cancers de la bouche sont un problème d’envergure mondiale. Plusieurs milliers de cas sont diagnostiqués partout dans le monde, précise Samer Karkout dans un entretien sur CDA Oasis. La difficulté, c’est que bon nombre de ces patients n’ont pas seulement un cancer. Souvent, ils ont aussi d’autres ennuis de santé, comme une maladie cardiovasculaire, de l’hypertension et du diabète.» Ces comorbidités ont une incidence sur le traitement, la guérison et la survie. L’étude de Samer Karkout et ses collaborateurs visait à déterminer quel indice (ASA ou CCI) était le meilleur prédicteur de survie chez les personnes atteintes d’un cancer de la bouche. À partir de données de l’Hôpital général de Montréal, l’étude a examiné 348 cas de cancer de la bouche et les a classés selon le score de comorbidité associé à chacun après leur stratification. En comparant les résultats, l’étude a fait ressortir que le CCI surpassait constamment la classification de l’ASA. «Le CCI établit une séparation plus large et plus précoce entre les deux groupes, ce qui indique qu’il pourrait être un meilleur prédicteur de survie globale que l’ASA», explique-t-il. Le CCI demeure efficace après des traitements majeurs, comme une radiothérapie ou une chirurgie, tandis que l’ASA perd son pouvoir prédicteur. «Cela nous indique que le CCI pourrait être un outil fiable pour prédire la survie de nos patients atteints d’un cancer de la bouche, peu importe la modalité de traitement choisie», confie-t-il. Pour Samer Karkout, ces résultats pourraient contribuer à améliorer la survie des patients cancéreux. «Nous voulons perfectionner cet outil et voir comment le personnaliser en fonction des patients. Comment pouvons-nous l’affiner pour les cancers de la bouche afin d’individualiser les traitements pour que nos patients en tirent le meilleur parti?» Ces résultats s’inscrivent dans l’essor de la médecine de précision au lieu des modèles de traitement universels et font ressortir l’importance d’utiliser les données médicales pour améliorer l’ensemble des soins des patients. Liens entre les gencives, le vieillissement et le corps Dans une autre optique, Ahmed Abbas, étudiant de quatrième année à l’École Schulich de médecine et de médecine dentaire de l’Université Western, a exploré les liens systémiques entre la parodontite et le vieillissement biologique. Son étude, Moderate to Severe Periodontitis Contributes to Accelerated Biological Aging in Middle-Aged and Older Canadians with Multimorbidity, s’attarde à la façon dont les maladies gingivales interagissent avec les maladies chroniques pour accélérer le vieillissement. «Cette étude a nécessité de nombreuses années de travail, explique Ahmed Abbas. Notre groupe de recherche s’est penché sur l’épigénétique et le vieillissement ainsi que sur la relation entre la parodontite et la santé globale. Je tiens par ailleurs à remercier ma mentore, la Dre Noha Gomaa, dont le soutien et les conseils tout au long de mes quatre années d’études ont été indispensables à cette recherche et plus encore.» Avec des maladies individuelles telles que les maladies cardiovasculaires, la maladie d’Alzheimer et la maladie de Parkinson, il était essentiel d’en comprendre l’incidence dans le contexte des multimorbidités. «Nous voulions savoir en quoi la parodontite est associée à une combinaison de maladies chroniques, car nous savons qu’elle a un mécanisme sous-jacent d’inflammation qui peut se propager dans tout le corps.» Cette inflammation peut créer un cercle vicieux : «Le mécanisme inflammatoire peut accélérer le vieillissement, et l’accélération du vieillissement peut causer plus d’inflammation, souligne Ahmed Abbas. En tant que dentistes, nous devons bien comprendre le lien entre la parodontite et d’autres maladies chroniques afin de bien prendre en charge nos patients et traiter l’inflammation générale de l’organisme.» À partir de l’Enquête canadienne sur les mesures de la santé de 2007-2009, son équipe a analysé les données de plus de 1000 personnes âgées de plus de 45 ans. « Les patients qui présentaient une multimorbidité et une parodontite avaient une prévalence de vieillissement accéléré de 20 à 40 % supérieure », affirme Ahmed Abbas. Cette étude fait ressortir l’importance des soins dentaires dans la prise en charge holistique de la santé, surtout pour les populations vieillissantes. «Ces résultats sont utiles pour la profession, parce qu’ils nous aident à bien connaître notre population, indique Ahmed Abbas. Nos recherches nous permettent de comprendre les interactions entre la parodontite, la multimorbidité et le vieillissement, ce qui peut orienter les prochaines recherches.» Pour en savoir plus sur les deux gagnants, rendez‑vous sur CDA Oasis [en anglais] : bit.ly/4oSR1ju 10 | 2025 | Numéro 6
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