La dentisterie non conventionnelle : Partie III. Les questions de droit et de réglementation

Burton H. Goldstein, DMD, MS, FRCD(C) •

Sommaire

Voici le troisième d’une série de cinq articles offrant un aperçu contemporain et une introduction à la dentisterie non conventionnelle (DNC) et sa corrélation avec la médecine non conventionnelle (MNC). La DNC présente des questions de charlatanisme, de fraude et de négligence professionnelle tout en suscitant des problèmes d’ordre professionnel touchant la protection du public et les risques professionnels. Des rapports de cas servent à illustrer de nombreuses questions. On incite le lecteur à les évaluer en fonction des problèmes liés à la négligence professionnelle, à la fraude, à la déontologie, aux comportements et au professionnalisme. Une discussion des questions d’ordre déontologique dépasserait la portée de cet article.

Mots clés MeSH : alternative medicine; dentistry; dentists/standards

J Can Dent Assoc 2000; 66:503-6
Cet article a fait l’objet d’une révision par des pairs.


Cas 1

Une femme âgée de 42 ans et en bonne santé s’est présentée chez son dentiste généraliste avec une douleur au quadrant gauche supérieur. Depuis deux ans, le dentiste lui prodiguait avec satisfaction des services généraux, préventifs et esthétiques, et la patiente appréciait sa philosophie dentaire «sans amalgame» et «sans radiographie inutile». Le dentiste a diagnostiqué un abcès à une dent maxillaire sur laquelle il avait effectué un traitement endodontique trois mois plus tôt. Il a recommandé l’extraction, et la patiente a accepté. Avant la procédure, le dentiste lui a donné des instructions pour qu’elle applique un protocole anti-inflammatoire pour «prévenir l’inflammation, l’enflure et la douleur, favoriser la coagulation sanguine et la guérison, prévenir les contusions et la douleur et... stimuler le système immunitaire de l’organisme afin de prévenir les infections.» Il lui a vendu des pro duits, y compris un qui contenait de l’extrait de racine d’échinacée (Echinacea angustolia), de la l-lysine, de l’extrait d’iris versicolore (Iris versicolor), de l’extrait de racine jaune (Hydrastis canadensis). Il lui a également fourni un composé d’Arnica montana, un remède homéopathique à base de plantes médicinales, et d’autres produits.

Après l’extraction de la dent, le dentiste a prescrit à la patiente de l’acétaminophène avec de la codéine et lui a demandé de continuer à prendre les médicaments du protocole. La patiente a éprouvé beaucoup de douleur après l’extraction et, deux jours plus tard, elle a téléphoné au dentiste pour lui faire part d’une enflure sous la mandibule gauche. Celui-ci lui aurait alors déclaré que c’était «sans doute des ganglions lymphatiques qui se forment alors que le système immunitaire commence à agir», et lui a recommandé de poursuivre avec les médicaments du protocole.

Quatre jours après l’extraction, la patiente est retournée chez le dentiste avec une douleur et une enflure de plus en plus grandes sous la mandibule gauche. Il lui a conseillé de consommer du yaourt avec des cultures actives, prévoyant une amélioration dans les 24 heures. Le lendemain, la patiente est allée consulter son médecin de famille qui lui a diagnostiqué une infection, lui a prescrit de la pénicilline et l’a adressée à un otolaryngologiste. Six jours après l’extraction, la patiente a été admise d’urgence à un hôpital avec le diagnostic, confirmé par tomodensitogramme, d’un abcès sous la mandibule gauche. Une incision extra-buccale et une procédure de drainage ayant été effectuées, la patiente s’est remise sans autres incidents et a été renvoyée chez elle après cinq jours d’hospitalisation. Un autre examen a permis de déterminer qu’une infection périapicale de la première molaire de la mandibule gauche avait causé l’abcès, et un traitement endodontique a été effectué avec succès.

Le dentiste n’avait pas pris de radiographies des dents infé rieures. L’Arnica montana a été étudiée dans des cas d’extraction dentaire, et on a découvert qu’elle cause une douleur et une enflure plus grandes qu’un placebo1 tout en n’étant d’aucune utilité contre la douleur, le trismus, l’enflure ou les saignements après extraction2. Une poursuite en justice a été réglée à l’amiable.

Cas 2

Une femme de 81 ans à qui un médecin avait diagnostiqué la maladie d’Alzheimer s’est rendue chez un dentiste généraliste pour des soins de routine. Divers symptômes non spécifiques lui ont été décrits, mais aucune douleur n’était ressentie ou déterminée. Des radiographies périapicales et panoramiques ont été prises à partir desquelles le dentiste a diagnostiqué une névralgie causant une ostéonécrose cavitationnelle (NCOC) — cavités de l’os maxillaire. Par la suite, durant trois mois, quatre procédures chirurgicales ont été effectuées sur cinq sites dans quatre quadrants, une allogreffe ayant été placée dans chacune des plaies opératoires et une membrane en collagène ayant été utilisée sur l’un des sites. Le dentiste a signalé qu’il a découvert de grandes lésions NCOC partout, et des prélèvements ont été recueillis et envoyés en un seul lot à un laboratoire qui était «le seul laboratoire pouvant diagnostiquer une NCOC». Tous les prélèvements ont été décrits comme une NCOC.

Deux spécialistes en radiologie buccale n’ont découvert aucune preuve de lésions osseuses sur les radiographies. Le dentiste a justifié le recours aux techniques de l’allogreffe et de la membrane en disant que des procédures similaires étaient «utilisées en implantologie» et qu’il prévoyait que les cavités NCOC ne guériraient pas. La NCOC n’était pas une matière qui était enseignée à l’école de médecine dentaire qu’il avait fréquentée. Elle le lui avait été enseignée dans un cours donné en fin de semaine dans un hôtel de villégiature, et la littérature qu’on lui avait alors remise constituait la seule source d’information qu’il connaissait. Il a déclaré que, après avoir suivi ce cours, il avait traité de 10 à 100 cas de NCOC avec une précision diagnostique de 100 %.

Selon le dentiste, les cavités infectées de l’os maxillaire étaient la cause de douleurs faciales, de maladies cardiaques, d’arthrite et d’autres problèmes systémiques. Le dentiste faisait partie d’un organisme qui prétendait pouvoir guérir ces problèmes en raclant ces cavités. L’organisme soutenait également le principe suivant lequel toutes les dents vitales et traitées par endodontie dans la région d’une cavité doivent être extraites. Un cas pertinent a été documenté dans un rapport d’enquête3; la poursuite en justice impliquant un dentiste a été réglée pour «une somme considérable»4.

Cas 3

Une femme de 50 ans souffrait d’une douleur et d’une enflure à la joue gauche et avait de la difficulté à dormir. Elle disait que la douleur et l’enflure étaient soulagées avec des remèdes à base de plantes médicinales. Depuis 15 ans, elle éprouvait des symptômes qui avaient commencé par une douleur à la mâchoire et au visage gauches et qui restreignaient l’ouverture de sa bouche. Au début, un spécialiste en chirurgie buccale et maxillo-faciale a diagnostiqué le syndrome d’Eagle et excisé l’apophyse styloïde gauche sans soulagement des symptômes.

Un prosthodontiste a ensuite diagnostiqué un problème de l’ATM et fourni à la patiente une attelle de nuit qui soulageait ses symptômes quand elle le portait. Il lui a alors conseillé une reconstruction de l’occlusion. Au cours d’une période de quatre ans, 24 couronnes et 14 traitements radiculaires ont été exécutés. Plusieurs symptômes ont persisté et changé durant les traitements, et un endodontiste a repris plusieurs traitements radiculaires et effectué une chirurgie apicale. Une obturation excessive a été observée sur deux molaires supérieures et, les symptômes du maxillaire persistant, un spécialiste en chirurgie buccale et maxillo-faciale a effectué une procédure Caldwell-Luc afin d’examiner les racines des molaires et retirer le matériau endodontique. Les symptômes ont persisté.

Finalement, la patiente a été adressée à une clinique universitaire se spécialisant dans les problèmes de l’ATM où des blocs anesthésiques locaux effectués à des fins diagnostiques ne sont pas parvenus à soulager entièrement la douleur. Une biopsie osseuse a été effectuée, et un spécialiste en pathologie buccale a déclaré que les os étaient normaux. La clinique a découvert qu’il n’y avait aucune anomalie à l’articulation et que, du point de vue clinique, l’occlusion était normale. Une année après que la reconstruction dentaire a été terminée, la patiente a déménagé et s’est retrouvée sous les soins d’un dentiste généraliste («spécialiste de l’ATM») qui a diagnostiqué un dysfonctionnement neuromusculaire à l’aide d’instruments d’électromyographie de surface et d’un appareil électronique de repositionnement de la mandibule. Des dispositifs de «repositionnement» de l’articulation ont été fournis pour un usage continuel. Les symptômes ont persisté.

Pendant 15 ans de douleurs buccales et faciales et de traitements dentaires, la patiente a vu un médecin de famille, un spécialiste en médecine interne, un psychologue, deux neurologues, un neurochirurgien et un otolaryngologue qui tous ont présenté des diagnostics équivalant à de la douleur musculaire, de l’anxiété, de la dépression et une douleur neurogène probable, sans anomalie neurologique ou maladie systémique sous-jacente. La patiente a utilisé sans satisfaction bon nombre de remèdes à base de plantes médicinales et consulté, dans une clinique de médecine parallèle au Mexique, un médecin qui lui a diagnostiqué une névralgie. Tous les praticiens non dentistes lui ont recommandé un traitement médical et déconseillé tout traitement dentaire.

Après une évaluation de ses douleurs par plusieurs spécialistes, on a diagnostiqué à la patiente des douleurs chroniques, une dépression légère, un problème temporo-mandibulaire antérieur probable se traduisant par une douleur et un dysfonctionnement myofasciaux, une douleur neurogène accompagnée d’une hyper algie et d’une allodynie, et une malocclusion iatrogène. Aucun trouble mental important n’a été découvert. La patiente souffrait d’une récurrence de carie et avait un rapport de béance postérieure bilatérale relié à l’appareil correcteur d’occlusion sur lequel elle comptait pour pouvoir mastiquer. On lui a recommandé de participer à un programme de gestion cognitivo-comportementale faisant partie d’un programme multidisciplinaire visant à soulager la douleur. Les coûts prévus pour rétablir une occlusion et une denture fonctionnelles variaient de 30 000 à 40 000 $, et les coûts prévus pour la gestion médicale étaient similaires.

Selon la patiente, bien qu’elle se soit soumise à de nombreux traitements dentaires qui ne lui ont pas été utiles et que les médecins lui déconseillaient sans cesse les procédures dentaires, elle avait foi dans un diagnostic dentaire et elle préférait l’avis des dentistes. Elle croyait que ses symptômes étaient d’ordre dentaire et elle a exprimé le désir de recevoir d’autres traitements dentaires avec extractions et implants.

Cas 4

Un homme âgé de 56 ans a été adressé à un spécialiste pour l’examen d’une lésion blanche à la joue gauche. Ayant fait l’objet d’une biopsie, la lésion est diagnostiquée comme une dysplasie moyenne. Une excision est recommandée, mais le patient va consulter un médecin naturopathe qui lui recommande des suppléments en lui disant qu’à son avis la chirurgie est inutile. Six mois plus tard, il se rend de nouveau chez le naturopathe; la lésion s’est agrandie, s’étendant au rebord marginal de la gencive. Une intervention lui est refusée. Six mois plus tard, il se présente avec une lésion persistante présentant une apparence plus irrégulière. Après biopsie, on diagnose un carcinome invasif qui est traité par résection locale et radiothérapie post-opératoire.

Charlatanisme, fraude et négligence professionnelle

Le charlatanisme se définit comme «la déclaration frauduleuse faite par une personne au sujet de sa compétence et de son expérience touchant le diagnostic et le traitement d’une maladie ou les effets recherchés par le traitement offert»5. Pour les dentistes, les médecins et les profanes, le charlatanisme peut se définir de manière générale comme «tout ce qui comprend la promotion excessive dans le domaine de la santé»6. Cette définition englobe les idées, les produits et les services de caractère suspect, et ce indépendamment de la sincérité des promoteurs.

Les méthodes, les produits et les services non éprouvés peuvent relever de l’expérience plutôt que du charlatanisme. Les méthodes non éprouvées exigent une étude scientifique officielle et le consentement éclairé des patients pour être reçues à titre expérimental plutôt qu’à titre de charlatanisme. Les méthodes dou teuses peuvent être nocives sur les plans physique, psychologique, émotif et financier à cause du traitement même, du retard ou de l’échec à en obtenir un qui soit utile, ou de la confusion qui en résulte7. Le charlatanisme est également préjudiciable en ce qu’il diminue la confiance du public dans la science, la médecine et la dentis terie, dénature la science et la santé publique, et favorise une dégénérescence de l’éthique professionnelle.

En matière de santé, la fraude est la promotion, l’annonce, la distribution ou la vente d’un service, d’un produit ou d’un remède pour le diagnostic, la prévention, la guérison, le traitement ou l’allégement d’une maladie (ou d’une autre affection) ou pour l’obtention d’un effet bénéfique sur la santé, mais qui n’a pas été scienti fiquement prouvé comme étant sûr et efficace à cette intention précise8. Le mot «fraude» suppose ordinairement une tromperie intentionnelle, sans foi dans la vérité de l’assertion ou, plus brutalement, sans égard pour la vérité9. En outre, une pratique promue sans une connaissance ou une compréhension suffisante peut, indépendamment d’une foi sincère, passer pour de la fraude8. Il est difficile de prouver une fraude devant la justice.

Par négligence professionnelle, on entend tout manquement aux normes d’exercice acceptées, c’est-à-dire aux compétences et aux connaissances qu’on attend raisonnablement de tout pourvoyeur dans la profession dans des circonstances similaires. Les tribunaux décident quelles sont les normes de soin pour chacun des cas. En médecine et en dentisterie, les normes d’exercice re flètent idéalement les connaissances et les méthodes scientifiques. Les praticiens non conventionnels autorisés comme les médecins naturopathes, les chiropraticiens et les massothérapeutes sont jugés suivant des normes d’exercice qui sont formulées dans leurs professions et qui peuvent être scientifiques ou non. Les praticiens non réglementés et non autorisés comme les herboristes, les praticiens du toucher thérapeutique et les réflexologistes ne possèdent pas de normes reconnues et particulières à une école, et ils peuvent être jugés suivant des normes de profane qui sont difficiles à définir, à évaluer et à quantifier10.

Le charlatanisme peut confiner à une négligence professionnelle, mais une négligence professionnelle n’est pas nécessairement entachée de charlatanisme. Par exemple, léser le nerf de la mandibule en extrayant une troisième molaire inférieure incluse sans avoir prévenu le patient peut constituer une négligence professionnelle, mais ce n’est pas du charlatanisme. Les attelles dentaires servent à prévenir l’usure des dents reliée à des habitudes, mais promouvoir ou utiliser des attelles dentaires afin de guérir une dysménorrhée peut passer pour du charlatanisme. Pour brouiller davantage les choses, recommander des remèdes homéopathiques en vue de prévenir une infection et de l’enflure peut être une norme d’exercice en naturopathie, mais relever du charlatanisme ou constituer une faute professionnelle chez un dentiste ou un médecin.

Aux États-Unis, selon les récentes données touchant les réclamations pour négligence professionnelle par des chiropraticiens, des massothérapeutes et des acuponcteurs, les réclamations sont moins fréquentes et les blessures moins graves chez ceux-ci que chez les médecins10. Actuellement, dans le système judiciaire canadien, les cas de médecine non conventionnelle (MNC) les plus fréquents impliquent des chiropraticiens11. On semble connaître, et ce de façon disproportionnée, peu de cas réglementaires, disciplinaires et judiciaires impliquant la dentisterie non conventionnelle (DNC). Maintenant que la dentisterie met de plus en plus l’accent sur les soins fondés sur les faits et sur des normes de soin scientifiques, les dentistes autorisés exerçant la DNC sont sans doute plus susceptibles d’être accusés de négligence lors d’une réclamation.

La protection du public

Les organismes chargés de protéger le public peuvent refuser de juger des traitements particuliers à cause des points de loi. Les produits peuvent faire l’objet d’essais objectifs et être approuvés pour leur sûreté, sans qu’il y ait de rapport avec leur validité ou leur efficacité pour diagnostiquer ou traiter des affections. Tant en science qu’en droit, la responsabilité d’établir la validité d’un traitement, son efficacité et sa sûreté appartient au promoteur.

Le diagnostic et le traitement des problèmes temporo- mandibulaires (PTM) offrent un exemple des problèmes qui sur gissent en faisant la promotion des méthodes non conventionnelles tout en voulant protéger le public. Suivant des critères et des recherches scientifiques, on a découvert que divers instruments électroniques manquent de validité théorique, ont une faible validité de mesure et une validité de diagnostic moindre que le hasard quand on les utilise pour le diagnostic et le traitement des PTM12. Dans la littérature scientifique, ces appareils sont considérés impropres pour ces usages12,13. Certains ont obtenu le sceau d’agrément de l’Association dentaire américaine «uniquement à titre d’aide technique pour le diagnostic des PTM.»14 La stipulation suivant laquelle «la responsabilité de la sélection judicieuse des patients pour les tests diagnostiques et l’interprétation des résultats appartient au dentiste»14 peut donner la fausse impression que les appareils électroniques approuvés ont une valeur scientifique, bien que la Food and Drug Administration des États-Unis ait conclu qu’ils ne sont pas efficaces pour le diagnostic et qu’ils conduisent souvent à un diagnostic excessif et à un traitement inutile15.

Les allégations faites par les promoteurs en matière de santé (par exemple, «guérit le cancer») peuvent être étudiées de près par les agences du gouvernement, mais les allégations d’ordre struc tural ou fonctionnel (par exemple, «renforce le système immunitaire») peuvent être dénuées de sens et exigent très peu de preuves pour être conformes à la loi. Plusieurs produits non conventionnels sont promus comme étant «nutritifs» et, par conséquent, n’exigent pas un examen réglementaire comparable à celui des médicaments. (Voir la Partie IV dans une prochaine édition pour plus de détails.) Les activités, les responsabilités, les restrictions et les préoccupations d’ordre juridique tant des organismes gouvernementaux que des organismes professionnels sont mal comprises en général et ajoutent à la confusion du public.

Le charlatanisme dentaire

Le charlatanisme dentaire, considéré ici comme de la promotion excessive ou des allégations médicales fausses ou non prouvées en dentisterie en vue d’obtenir un gain (y compris les idées, les produits et les services douteux), inquiète la profession8,16,17. Son histoire est parallèle à celle du charlatanisme médical17,18 et illustre l’évolution d’un langage particulier. Le recours ordinaire à des trucs sémantiques comme «les mots à double entente» (usage impropre de mots par lequel on dénature la communication de manière à induire en erreur, à déformer, à tromper ou à circonvenir), le jargon pseudo-médical (mots vides, impossibles à mesurer) et «les mots ambigus» (incitant à faire accepter comme vrai ce qui a été seulement insinué ou suggéré) est souvent associé à la promotion de la DNC19. La publicité des produits s’est élevée à une forme d’art, celle de la déception sémantique.

Outre des inventions non éprouvées de toutes sortes et le langage trompeur, les vieux concepts sont recyclés et reformulés dans la promotion du charlatanisme dentaire. Voici un exemple de ce genre d’allégation douteuse et sans fondement : «La recherche... a démontré non seulement que les dents ayant fait l’objet d’un traitement radiculaire restent toujours infectées, mais aussi que ces dents contribuent à des maladies dégénératives.»20 Bien qu’il n’y ait aucune preuve scientifique d’une relation cause/effet, l’association entre l’infection dentaire et les maladies systémiques (théorie de l’infection focale) continue à être un sujet d’intérêt en recherche21,22.

Leçons

La dentisterie comprend des procédures physiques avec des risques inhérents de complications, ouvrant ainsi la porte à un nombre croissant de litiges. Les cas décrits devraient inquiéter tous les dentistes. La loi touchant la responsabilité professionnelle en matière de MNC et de DNC est encore en pleine élaboration11,23. Les cas de DNC ayant fait l’objet d’une publication sont rares, mais la jurisprudence en matière de MNC se développe de plus en plus.

Les organismes de réglementation dentaires s’inquiètent du nombre grandissant de plaintes touchant des questions de soins non conventionnels allant des honoraires aux préjudices causés aux patients. En Alberta, les médecins diplômés qui exercent la MNC («thérapie sanitaire complémentaire») sont tenus de s’inscrire au Collège des médecins et des chirurgiens pour pouvoir exercer la MNC24, et des guides d’exercice détaillés ont été rédigés pour la MNC. Autant que l’auteur le sache, il n’y a aucune juridiction en Amérique du Nord réglementant la DNC pratiquée par des dentistes.


Remerciements : L’auteur remercie Mme Maris McMillan, Harbottle & Co., avocats et procureurs, et le Dr Joel Epstein pour ses commentaires utiles et pour avoir fourni l’exemple du cas 4.

Le Dr Goldstein est professeur agrégé de clinique à la Faculté de médecine dentaire de l’Université de la Colombie-Britannique.

Écrire au : Dr Burton H. Goldstein, 208-2223, Broadway O., Vancouver, BC V6K 2E4. Courriel : burtgold@unixg.ubc.ca.  

Les vues exprimées sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement les opinions et les politiques officielles de l’Association dentaire canadienne.


Références

1. Kaziro GS. Metronidazole (Flagyl) and Arnica Montana in the prevention of post-surgical complications, a comparative placebo controlled clinical trial. Br J Oral Maxillofac Surg 1984; 22:42-9.

2. Lokken P, Straumsheim PA, Tveiten D, Skjelbred P, Borchgrevink CF. Effect of homeopathy on pain and other events after acute trauma: placebo controlled clinical trial with bilateral oral surgery. BMJ 1995; 310:1439-42.

3. Filmanowicz S. Bone of contention. Milwaukee Magazine Jan 1994; p. 27-35, 69, 99.

4. Harding VC. Warshafsky, Rotter, Tarnoff, Reinhardt & Bloch, S.C., Milwaukee, Wisconsin. Quoted in Milwaukee Journal Sentinel, 1998 Jul 7; p. 1,6.

5. Dorland’s Illustrated Medical Dictionary. 28th ed. WB Saunders Co.; 1994.

6. Barrett, S. Quackery: how should it be defined? Quackwatch. Disponible à l’adresse URL : http://www.quackwatch.com.

7. Berry JH. Emphasis. Questionable care: what can be done about dental quackery? JADA 1987; 115:679-85.

8. U.S. Food and Drug Administration. Health fraud — factors in considering regulatory action. Compliance Policy Guide 120.500. Disponible à l’adresse URL : http://www.fda.gov.

9. Derry v. Peek (1889), 14 App. Cas. 337:374-376. [House of Lords].

10. Studdert DM, Eisenberg DM, Miller FH, Curto DA, Kaptchuk TJ, Brennan TA. Medical malpractice implications of alternative medicine. JAMA 1998; 280:1610-5.

11. Cohen L. Suing the alternative health-care provider. Canadian Lawyer 1999; 23:47-51.

12. Lund JP, Widmer CG, Feine JS. Validity of diagnostic and monitoring tests used for temporomandibular disorders. J Dent Res 1995; 74:1133-43.

13. Lund JP, Lavigne G, Feine JS, Goulet JP, Chaytor DV, Sessle BJ and others. The use of electronic devices in the diagnosis and treatment of temporomandibular disorders. J Can Dent Assoc 1989; 55:749-50.

14. Report on acceptance of TMD devices. ADA Council on Scientific Affairs. JADA 1996; 127:1615-6.

15. Dodes JE, Leonard M. High-tech diagnosis and treatment of temporomandibular disorders: the misuse of technology. Technology 1999; 6:287-92.

16. Greene CS. Holistic dentistry. Where does the holistic end and the quackery begin? JADA 1981; 102:25-7.

17. Mandel ID. Dental quackery: a retrospective view. JADA 1994; 125:153-60.

18. Oumeish OY. The philosophical, cultural, and historical aspects of complementary, alternative, unconventional, and integrative medicine in the Old World. Arch Dermatol 1998; 134:1373-86.

19. Dodes JE. Doublespeak, weasel words, and “alternative” therapies. The Farran Report; 1994 March 9-10.

20. Sebeslav J. Toxin factories: the truth about root canals. Healthy Living Guide, Canadian Health Reform Products Ltd. 1997; p. 22-23.

21. Slavkin HC. Does the mouth put the heart at risk? JADA 1999; 130:109-13.

22. Slots J. Casual or causal relationship between periodontal infection and non-oral disease? J Dent Res 1998; 77:1764-5.

23. Weintraub MI. Legal implications of practicing alternative medicine. JAMA 1999; 281:1698-9.

24. College of Physicians and Surgeons. Province of Alberta. Complementary health care therapy provided by medical practitioners. 1996.


Le Centre de documentation de l’ADC

Le Centre de documentation de l’ADC peut offrir aux membres toute référence citée dans cet article. Pour obtenir plus d’information sur les services et les frais, veuillez joindre le Centre de documentation, tél. : 1-800-267-6354 ou au (613) 523-1770, poste 2223; téléc. : (613) 523-6574; courriel : info@cda-adc.ca.