Le remplacement d’une seule dent : le pont vs la restauration sur implant

Ken Hebel, B.Sc., DDS, MS, Cert. Prostho. •
Reena Gajjar, DDS, Cert. Prostho. •
Theresa Hofstede, B.Sc., Cert. Prostho. •

Sommaire

La prothèse fixe partielle, la restauration liée à la résine et l’implant sont les choix qui s’offrent au dentiste pour restaurer une seule dent. Le présent article traite des avantages et des inconvénients de ces méthodes, ainsi que des facteurs à prendre en considération au moment de décider comment remplacer une seule dent. Même si dans certains cas la prothèse fixe partielle est la solution la plus indiquée, les implants ont l’avantage de préserver l’intégrité des dents saines adjacentes à la partie édentée.

Mots clés MeSH : dental implants, single tooth; dental prosthesis, implant-supported; tooth loss/rehabilitation

© J Can Dent Assoc 2000; 66:435-8
Cet article a fait l’objet d’une révision par des pairs.


Les dentistes sont souvent confrontés au problème de restaurer une seule dent dans une dentition non restaurée. Un traumatisme, des caries et l’absence congénitale de dents sont des causes fréquentes de ce problème. En pareils cas, les options thérapeutiques qui s’offrent au dentiste comprennent une prothèse fixe partielle traditionnelle, une restauration liée à la résine ou un implant. Bien que chacune de ces options soit acceptable, la restauration sur implant présente des avantages certains. Elle permet une restauration esthétique et fonctionnelle au résultat prévisible à longue échéance1, et elle constitue le traitement idéal pour le remplacement d’une seule dent dans une dentition autrement impeccable.

La prothèse fixe partielle

Dans le cas d’un seul espace édenté, le traitement habituel est la pose d’une prothèse fixe partielle traditionnelle. Cette solution présente toutefois l’inconvénient majeur de réduire sensiblement les dents-piliers2. Les situations où il faut se soucier de l’aspect esthétique requièrent des marges sous-gingivales, et celles-ci peuvent accroître l’incidence d’inflammation des gencives3,4. On estime en outre qu’une prothèse fixe partielle dure de 8,3 à 10,3 ans5,6. Par conséquent, il faudra remplacer cette restauration plusieurs fois au cours de la vie d’un jeune patient.

Cependant, il arrive qu’une prothèse fixe partielle demeure la solution la plus indiquée, comme le démontrent les illustrations 1 à 4. Les incisives latérales de cette jeune femme manquent en raison d’une fissure labiale et d’une fissure palatine bilatérales (Ill. 1). La déminéralisation des faces linguales des incisives centrales ne permettait pas le recours aux ponts liés à la résine. L’absence de matière osseuse empêchait la pose d’implants; la prothèse fixe partielle a donc été le traitement de premier choix. Les illustrations 2, 3 et 4 montrent des ponts Empress 2.


La restauration liée à la résine

Les ponts liés à la résine sont apparus comme solution de rechange aux prothèses fixes partielles traditionnelles après que Rochette7 eut proposé cette restauration comme attelle parodontale. Cette solution constitue une méthode de remplacement plus conservatrice; la préparation des dents se limite aux faces linguales des dents-piliers. Ces préparations nécessitent toutefois une technique plus sûre, car elles doivent demeurer dans l’émail tout en laissant un espace libre sur la face occlusale et assez de place pour les restaurations. La fréquence des décollages est le principal inconvénient des ponts liés à la résine; on a signalé des taux de décollage de l’ordre de 25 à 31 %8,9.

Les implants

L’osséointégration des implants est, depuis le début des années 1980, un traitement bien établi et dont l’issue est prévisible. Les implants buccaux ont d’abord été utilisés dans les cas d’édentation complète10,11. On a ensuite connu beaucoup de succès avec la pose d’implants dans des maxillaires partiellement édentés12,13. La pose d’un implant pour une seule dent est aussi devenue une option thérapeutique dont le résultat est prévisible1,14.

Les implants offrent des avantages certains par rapport aux ponts liés à la résine et aux ponts traditionnels. Ils permettent d’éviter des restaurations inutiles aux dents saines adjacentes à l’espace édenté, qu’il faudrait effectuer dans le cas d’une prothèse fixe partielle. Dans les cas où les dents adjacentes ne présentent aucune restauration, l’implant à une seule dent permet de préserver l’intégrité des dents existantes (Ill. 5, 6 et 7).

L’implant pour une seule dent est sans aucun doute le traitement de choix dans le cas d’une absence congénitale de dents chez les jeunes personnes. Les illustrations 8 ,9, 10, 11 montrent la restauration d’une absence congénitale d’incisives maxillaires latérales par la pose de deux implants. Les restaurations finales sont très esthétiques et fonctionnelles et préservent la structure des dents existantes.


Le pont ou l’implant

Il faut tenir compte de plusieurs facteurs au moment de choisir entre un pont à 3 unités et un implant pour le remplacement d’une seule dent. Ce choix est souvent fondé sur les préférences du dentiste plutôt que sur l’évaluation objective des options thérapeutiques. En fait les deux traitements comportent chacun des avantages et des inconvénients.

La pose d’un pont à 3 unités fait partie de la formation et de l’expérience de la plupart des praticiens de la dentisterie restauratrice. Ce type de restauration nécessite la réduction des dents-piliers, ce qui accentue le taux d’incidence de la carie radiculaire et des traitements endodontiques (Ill. 12)15. Une préparation des dents-piliers serait avantageuse si celles-ci comportent de grandes restaurations. Cependant, si les dents ne sont que légèrement restaurées ou s’il s’agit de dents vierges, la préparation des dents-piliers pourrait les endommager et les exposer à un risque accru. En outre, la perte ou l’érosion du ciment sous un rétenteur peut mener à la perte de dents. Les ponts constituent une restauration unique. Si l’on en croit l’expérience clinique, l’échec d’une partie du pont entraîne l’échec de toute la restauration, et souvent la perte d’une dent-pilier. En dépit de ces inconvénients, on peut habituellement poser un pont à 3 unités en peu de temps, souvent avec le soutien financier de l’assurance dentaire, et l’on peut raisonnablement prévoir le résultat esthétique.

La pose d’implants nécessite une formation qui n’est pas assez approfondie dans la plupart des programmes dentaires de premier cycle. Par conséquent, elle ne fait pas partie des compétences de tous les praticiens de la dentisterie restauratrice. La pose d’un implant prend plus de temps que celle d’un pont à 3 unités, mais son coût est similaire s’il n’est pas nécessaire de procéder à une greffe. Les régimes d’assurance dentaire couvrent rarement la pose d’implants. La pose d’implants peut en outre être plus exigeante si l’os et les tissus mous sont inadéquats. On ignore souvent ces défauts, mais une greffe devrait être pratiquée dans l’espace pontique des ponts à 3 unités.

L’avantage considérable que comporte l’implant à une seule dent réside dans l’absence de préparation des dents adjacentes. Ces dents demeurent dans leur état courant et ne font pas partie d’une restauration plus élargie. Le pronostic de ces dents est donc meilleur puisqu’elles ne sont pas sujettes à une incidence élevée de carie et de traitement endodontique attribuable à la préparation de la dent. On devrait informer correctement les patients sur les avantages et les inconvénients de ces deux types de remplacement d’une seule dent afin qu’ils puissent prendre une décision éclairée.

Les progrès technologiques ont modifié notre philosophie en matière de remplacement d’une seule dent. Dans bien des cas, l’implant pour une seule dent est le traitement de choix car il donne de très bons résultats à longue échéance sur les plans esthétique et fonctionnel.


Le Dr Hebel est professeur adjoint au Département de prosthodontie (cycle supérieur) du Centre dentaire Eastman, Rochester (N.Y.) et exerce dans un cabinet privé à London (Ontario). Il est maître de conférence sur les implants dentaires pour Nobel Biocare.

Le Dr Gajjar exerce dans un cabinet privé à London (Ontario).

Le Dr Hofstede est professeur adjoint à l’Université Nova Southeastern, Fort Lauderdale, Floride.

Écrire au : Dr Kenneth S. Hebel, 813, rue Richmond, London, ON N6A 3H6. Courriel : khebel@julian.uwo.ca


Références

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