Contrairement au doute ordinaire, situationnel ou constructif, le syndrome de l’imposteur peut être omniprésent et paralysant. Il sape la confiance en soi et empêche souvent les professionnels compétents de profiter de leurs succès ou de progresser dans leur carrière. Du doute de soi à la conscience de soi Pour la Dre Metcalfe, c’est à la faculté dentaire qu’elle a pris conscience qu’elle souffrait du syndrome de l’imposteur. Malgré ses qualifications, elle se souvient de son angoisse lors de la journée d’orientation, convaincue qu’elle avait été admise par erreur. « Je me rappelle avoir pensé qu’ils allaient arriver à mon nom, se rendre compte de leur erreur et me renvoyer à Toronto », raconte-t-elle. Ses réalisations n’ont pas suffi à dissiper ces sentiments. « Peu importe ce que j’accomplissais, j’avais l’impression de ne pas être à ma place. Chaque obstacle, chaque défi ou chaque erreur me semblait énorme, et j’avais constamment l’impression que quelqu’un allait découvrir que je n’étais pas à ma place », se souvient-elle. Le fait d’identifier ce dialogue interne l’a aidée à changer. « Une fois que j’ai trouvé les mots pour décrire ce sentiment, j’ai commencé à comprendre comment je me parlais à moi-même et comment cela influençait ma confiance et mon expérience. » Les dentistes atteints du syndrome de l’imposteur considèrent chaque complication comme un échec personnel. La Dre Metcalfe conseille aux praticiens d’être attentifs à leur discours intérieur après des procédures difficiles. « Est-ce que vous partez en pensant : « Cette couronne ne tiendra pas parce que je suis un mauvais dentiste »? Ou pouvez-vous reconnaître que le patient était anxieux, que la visibilité était limitée et que vous avez fait de votre mieux dans des conditions difficiles? » Ce recadrage contextualise les erreurs cliniques, mais ne les excuse pas. Il fait passer le discours de « J’ai échoué » à « C’était un cas difficile, et j’en ai tiré des leçons ». Il est essentiel de prendre conscience de cela. «Vous ne pouvez pas changer ce que vous ne reconnaissez pas », rappelle-t-elle. Une tempête parfaite en médecine dentaire La médecine dentaire, qui met l’accent sur l’esthétique et la précision, peut être le berceau du syndrome de l’imposteur. Les étudiants en médecine dentaire sont confrontés à une concurrence intense dès le premier jour. «Vous passez du statut d’étudiant brillant à celui d’étudiant parmi des dizaines d’autres qui sont eux aussi brillants», explique la Dre Metcalfe. «La barre ne cesse de monter.» Dans ce contexte, elle se souvient que des expressions telles que «mains d’or» étaient couramment utilisées; une expression destinée à louer les compétences cliniques, mais qui peut alimenter les comparaisons injustes et l’insécurité. «Vous commencez à intérioriser l’idée que si vous n’êtes pas parfait dès le départ, vous prenez du retard», explique-t-elle. Le perfectionnisme et la concurrence dans les soins cliniques créent des enjeux psychologiques importants. Les réseaux sociaux accentuent également cette pression. «Nous sommes submergés d’images avant/après et de préparations impeccables lors de conférences ou sur les réseaux sociaux », explique-t-elle. «Mais nous ne voyons pas les dizaines de tentatives imparfaites, la courbe d’apprentissage ou les difficultés en coulisses.» Cette vision déformée pousse les dentistes à se comparer à leurs collègues, ce qui crée un sentiment d’inadéquation caractéristique du syndrome de l’imposteur. Le perfectionnisme et la concurrence dans les soins cliniques créent des enjeux psychologiques importants. Les réseaux sociaux accentuent également cette pression. Contrairement au doute ordinaire, situationnel ou constructif, le syndrome de l’imposteur peut être omniprésent et paralysant. 32 | 2025 | Numéro 5 Pratico-pratique
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